Les parents se séparent : comment préserver les enfants?
Emission France Inter 29 Janvier 2022
https://www.franceinter.fr/emissions/barbatruc/barbatruc-du-samedi-29-janvier-2022
Mercredi 2 Février 2022 Sortie du film PETITE SOLANGE, d’Axelle ROPERT
1er Janvier 2021 Entrée en vigueur de la réforme des pensions alimentaires : La Médiation Familiale une aide pour s’accorder
LA NOUVELLE LOI SUR LE DIVORCE 1er Septembre 2020
La réforme supprime la phase de conciliation qui précédait la requête conjointe de saisine de la juridiction (dans le cas où les deux époux étaient d’accord pour divorcer) ou l’assignation en divorce délivrée par voie d’huissier (dans l’hypothèse où l’un des époux refusait d’apporter sa participation à la procédure de divorce).
Ainsi, la procédure de divorce, avant l’entrée en vigueur de la réforme susmentionnée, se présentait ainsi :
À partir du 1er septembre 2020, la procédure de divorce sera la suivante :
(*)Il existe désormais une étape de l’instance au cours de laquelle un époux peut formuler des prétentions relatives aux mesures provisoires (nouvel article 251 du code civil).
Les mesures provisoires, qui jusqu’à présent étaient prononcées par le juge au stade de l’ordonnance de non-conciliation pourront l’être, dans le cadre de l’instance, dès le début de la procédure.
Une audience dédiée se tiendra systématiquement, sauf si les parties ou la partie seule constituée y renonce.
Dans ce cadre, le juge décide des mesures nécessaires pour « assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande en divorce à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée, en considération des accords éventuels des époux (nouvel article 254 du code civil).
La requête initiale étant supprimée, la possibilité de demander des mesures urgentes (résidence séparée et mesures conservatoires) à ce stade l’est aussi (ancien article 257 abrogé).
Néanmoins, de telles mesures pourront toujours être prises mais dans d’autres cadres procéduraux. Par exemple, l’autorisation de résider séparément peut être obtenue en cas de violences conjugales via une ordonnance de protection (article 515-9 du code civil).
La vocation d’une telle réforme réside dans une simplification du parcours procédural et processuel des époux en instance de divorce et de réduction des délais de traitement notamment dans les situations simples où il n’y a pas d’enfants mineurs ou d’enjeux financiers majeurs.
Divorcer chez son avocat
La réforme a, à certains égard, poursuivi le travail de déjudiciarisation, donnant ainsi une plus grande liberté aux époux qui grâce à leurs avocats, n’ont plus besoin de passer par la case tribunal.
L’instauration de l’acceptation par acte sous seing privé du divorce
Pour pallier la suppression de la phase de conciliation, une phase conventionnelle sera mise en place : avant la saisine du juge, les époux, chacun assisté de son avocat, pourront accepter le principe de rupture du mariage par un acte sous seing privé contresigné par les avocats.
C’est sur la base de cet acte que le divorce pourra ensuite être demandé par les époux ou au moins l’un d’entre eux (nouvel article 233 alinéa 2 du code civil).
Si le juge était déjà absent de la procédure de séparation de corps par consentement mutuel depuis le 25 mars 2019…
…il est désormais possible de convertir la séparation de corps par consentement mutuel en divorce par consentement mutuel sans passer devant le juge.
Les questions relatives à la séparation de corps (pension alimentaire, nom des époux…) peuvent être réglés par acte sous signature privé contresigné par avocat et déposé au rang des minutes d’un notaire (articles 300, 301 et 303 modifiés du code civil).
Les modifications pratiques
Sur les modes de divorce contentieux
Afin d’éviter que le déclenchement de la procédure de divorce empêche hermétiquement le dialogue entre les époux, le type de divorce envisagé ne doit plus être indiqué dans la requête initiale ; il n’est décidé que dans l’assignation. Ainsi, il est prévu que :
« l’époux qui introduit l’instance en divorce peut indiquer les motifs de sa demande si celle-ci est fondée sur l’acceptation du principe de la rupture du mariage ou l’altération définitive du lien conjugal.
Hors ces deux cas, le fondement de la demande doit être exposé dans les premières conclusions au fond » (nouvel article 251′ du code civil).
Autrement dit, l’époux qui introduit l’instance pourra d’emblée dire qu’il demande un divorce accepté ou pour altération du lien conjugal, mais pas un divorce pour faute.
Dans ce dernier cas, il ne devra l’exprimer que dans ses premières conclusions au fond.
Sur les délais et la prise d’effet
En l’absence d’ordonnance de non-conciliation ou de requête initiale, le point de départ des effets du divorce entre les époux est désormais la demande en divorce (nouvel article 262-1 du code civil).
S’agissant de l’éviction de la présomption de paternité lorsque l’enfant était né plus de 300 jours après la date de l’ordonnance de non-conciliation, le point de départ est désormais situé au jour de l’introduction de la demande en divorce (article 313 du Code civil).
C’est également ce point de départ que retient l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique pour empêcher la poursuite d’une assistance médicale à la procréation.
Un choix moins contraignant du mode de divorce
Le divorce pour altération définitive du lien conjugal désormais facilité
Alors qu’il fallait jusqu’alors que la vie commune ait cessé depuis au moins 2 ans, cette durée est raccourcie de moitié : il est désormais suffisant que la vie commune ait cessé depuis 1 an (article 238 du code civil modifié).
Divorce « accepté » désormais possible pour les majeurs protégés
Malgré la nécessité d’une volonté libre et éclairée pour le divorce « d’accord », et les difficultés que cette question soulève concernant les majeurs protégés, un tel divorce est désormais accessible à ces derniers, quelque soit leur régime de protection (article 249 nouveau du code civil).
Ils n’ont en revanche toujours pas la possibilité de recourir à un divorce par consentement mutuel. Les majeurs sous tutelle peuvent désormais également divorcer sans que l’autorisation du conseil de famille ou du juge des tutelles ne soit nécessaire.
LA CROIX 22/1/2019 « Couple, trouver le bon mode de communication »
En cas de crise conjugale, voire de séparation, les conjoints peuvent être accompagnés par un médiateur dans leurs décisions communes. Entretien Isabelle Jues, médiatrice familiale (1)
La Croix : Dans quelles circonstances un couple est-il amené à rencontrer un médiateur ?
Isabelle Jues : Un couple peut rencontrer un médiateur lorsqu’il est en situation de crise et/ou a une décision importante à prendre. Par exemple, deux partenaires ont chacun trois enfants de leur côté et hésitent à s’installer ensemble. Autre cas possible : un couple, en situation de crise, se pose la question de la séparation et de ses conséquences. Le médiateur peut, le cas échéant, aider les ex-conjoints à maintenir la communication au-delà de la rupture et à prendre ensemble des décisions.
La médiation agit sur deux registres : à la fois sur le plan concret (l’argent, le logement, la répartition des rôles, le rythme d’accueil de l’enfant…) et la qualité relationnelle. Notre rôle étant de favoriser une atmosphère de discussion et d’accompagner les personnes.
Les deux conjoints doivent-ils être tous deux d’accord pour accomplir cette démarche ?
I.J. : Soit les conjoints ont pris ensemble la décision, soit ils ont été conseillés par un avocat (ou un autre professionnel), soit ils sont déjà en procédure et le magistrat les envoie en médiation. Le principe fondateur, c’est la libre adhésion des personnes. Si l’une des deux n’est pas d’accord, on peut recevoir l’autre pour réfléchir aux intérêts et aux inconvénients de la démarche afin qu’elle puisse en parler à son partenaire. On travaille ensemble sur les freins, sur les conditions nécessaires pour que chacun ait envie d’être là et se sente en sécurité dans cet espace de discussion.
En quoi consiste précisément la mission du médiateur ?
I.J. : Le médiateur a pour mission d’accompagner les personnes dans la poursuite de leur objectif et de construire du lien. Un seul rendez-vous peut suffire mais en moyenne trois ou quatre rencontres permettent de trouver des accords sur les sujets qui les préoccupent, de les accompagner dans leur processus de décision commune, de travailler sur la qualité des relations. Nous nous appuyons sur les valeurs d’autonomie, de responsabilité ainsi que sur les vertus civiques d’autodétermination et de considération mutuelle. Notre rôle est de permettre aux partenaires de prendre de la distance par rapport aux événements, d’être en capacité d’écouter l’autre et de discuter avec lui.
S’agit-il de communiquer davantage ? De communiquer mieux ?
I.J. : L’objectif, c’est de trouver le mode de communication qui convient. Selon la situation, les conjoints vont peut-être devoir communiquer encore plus qu’avant. Parfois, ils ont besoin de mettre de la distance entre eux. Ils éviteront alors de se parler de vive voix et privilégieront le mail. Dans les cas de séparation de couples ayant des enfants, les parents sont obligés de rester en lien parce qu’ils ont des décisions communes à prendre concernant leur progéniture.
En médiation, les parents séparés recomposent leur relation à l’enfant
Le travail en médiation consiste alors à discerner ce qui appartient à l’histoire conjugale et ce qui relève de divergences éducatives, les deux domaines étant souvent mêlés. Parvenir à se mettre d’accord sur un cadre concret peut changer la façon de se parler, au grand soulagement de la famille. S’ils n’ont pas d’enfant, les conjoints peuvent parler des conséquences de leur séparation, afin que celle-ci s’effectue correctement. C’est une manière pour eux de tourner la page en préservant leur dignité.
Recueilli par France Lebreton
UN SYSTEME DE CERTIFICATION POUR LES MEDIATEURS
Par Jean-François Pellerin du SYME 25/4/18
« Pour gagner la confiance du public et des prescripteurs de médiation, il nous faut clarifier l’identité professionnelle des médiateurs. Dans cette clarification, un système de certification unique pour les médiateurs semble essentiel.
Du point de vue de l’utilisateur, les formations de médiation ne sont pas suffisantes pour garantir la compétence professionnelle d’un médiateur. Tout le monde peut comprendre que ces formations sont très diverses dans leurs contenus, leurs durées et leur sélectivité. Ensuite la plupart de ces formations ne proposent aucune expérience pratique. Or la médiation est, au-delà des connaissances théoriques indispensables, un art d’exécution, et le médiateur ne peut s’y engager sans une phase d’apprentissage. Personne n’imagine un dentiste qui n’aurait jamais eu la possibilité d’exercer sous le contrôle d’un autre professionnel avant d’exercer en solo. Enfin, l’expérience acquise dans les formations puis dans la pratique des entretiens de médiation doit encore être complétée par la formation continue et par des actions régulières d’analyse de pratique.
Tous ces arguments nous incitent à préconiser que la certification du médiateur s’appuie non seulement sur ses formations, mais sur un référentiel unifié de compétences. Pour chacune des compétences de ce référentiel, le médiateur doit pouvoir fournir des éléments probants. Ces éléments pourraient par exemple être fournis sous la forme d’un document, qui ferait l’objet d’un premier examen par un jury. En cas d’admissibilité après cette première étape, un oral avec le même jury devrait permettre, après vérification que la formation initiale est complétée de formations continues et d’actions régulières d’analyse de pratique, de valider la certification. Il existe un noyau de compétences communes aux médiateurs, et ce noyau doit pouvoir faire l’objet d’un premier niveau de certification, qu’on pourrait appeler généraliste.
Mais un médiateur est-il assimilable à un généraliste, simplement chargé de dérouler un processus de médiation standardisé ? Ce serait bien commode, mais c’est excessivement réducteur : un médiateur se doit d’appréhender un contexte souvent complexe, afin d’y intervenir de façon appropriée. Personne n’imagine un médiateur intervenant sur une situation conflictuelle en entreprise alors qu’il n’a aucune expérience de l’organisation, des codes et de la culture des entreprises d’aujourd’hui. Le raisonnement est le même s’il s’agit d’intervenir dans le domaine familial, pour lequel les tenants du DEMF font valoir une légitime spécificité, mais aussi dans le domaine sanitaire, le domaine social, ou même le domaine scolaire… Les principaux domaines d’intervention en médiation doivent être identifiés, et faire l’objet d’attestations de compétences complémentaires à la certification de base. Ainsi seront définies plusieurs spécialisations, et leur nombre pourra évoluer au rythme du développement des différents champs de médiation.
Nous avons ainsi esquissé un système de certification, qui reposerait sur une certification de base, ou généraliste, complétée par des certifications de spécialités. Une certification implique un renouvellement périodique. L’idée est de proposer ensuite un renouvellement tous les 5 ans, avec pour ce renouvellement un processus évidemment très allégé.
Pour s’assurer que ce système de certification soit acceptable pour les médiateurs, il faut encore qu’il soit proposé à un tarif compétitif, afin que la charge financière soit acceptable pour ceux qui ont déjà consenti des efforts importants pour se former et effectuer leur installation professionnelle. Il faut également que cette certification puisse s’articuler efficacement avec les formations existantes. La certification doit logiquement être attribuée indépendamment des centres de formation, mais une coopération ou articulation des points-clés entre centres de formation et organisme certificateur doit être envisagé. Il faut enfin que des solutions transitoires de facilitation puissent être proposées pour la certification de ceux qui viennent de passer leur diplôme.
Pour finir, nous sommes convaincus que la principale condition du succès d’une certification de ce type sera liée à sa capacité à faire l’unanimité autour d’elle. Il est toujours possible d’obtenir une forme d’unanimité par la contrainte d’un texte législatif ou réglementaire, mais cela n’est pas la solution la plus adaptée à une activité telle que la médiation, qui fait appel au sens des responsabilités individuelles. Nous espérons donc que les médiateurs et leurs associations auront à cœur de coopérer à une démarche de ce type, afin que cie système de certification voie le jour et soit rapidement adopté par le plus grand nombre. Bien entendu, nous ne sous-estimons pas ce point-clé…
An savoir plus sur https://www.syme.eu/articles/24379
La TENTATIVE DE MEDIATION OBLIGATOIRE AU TGI DE PONTOISE – Décret du 22 Mars 17
Ainsi que pour les dix autres Tribunaux de Grande Instance de Bayonne, Bordeaux, Cherbourg-en-Cotentin, Evry, Nantes, Nîmes, Montpellier, Rennes, Saint-Denis et Tours, La loi de modernisation de la Justice du XXI ème siècle instaure, à titre expérimental, la médiation préalable obligatoire pour les litiges concernant l’exercice de l’autorité parentale et les pensions alimentaires, pour les justiciables qui saisiront le Cabinet des Affaires Familiales de Pontoise.
Le test est mis en place, jusqu’à fin 2019, et signifie que la saisine du juge doit dorénavant être précédée d’une tentative de médiation familiale, afin de trouver des solutions amiables.
Cette mesure ne s’applique pas lorsque la demande émane conjointement des deux parents afin de solliciter l’homologation de leur convention. De même le recours à la médiation familiale ne sera pas obligatoire en cas de violences commises par l’un des parents sur l’autre ou sur l’enfant.
2017 : Comment se remettre d’un divorce ou d’une séparation ? La médiation familiale offre un espace pour faire le bilan conjugal, organiser la co-parentalité, et ainsi traverser cette période douloureuse pour faire son deuil de la relation…
2016 Au théatre de Poche, Paris Montparnasse
http://www.theatredepoche-montparnasse.com/project/la-mediation/
2015, 13 Novembre : Semaine Nationale de la Médiation Familiale
MF et intérêt de l’enfant :
2014, 2 Mai « La presse en parle » 2 Mai 2014, Extrait Huffpost, C’est la Vie
Faut-il faire du médiateur la personne à tout faire des conflits familiaux?
Alors que des députés, reprenant certains des aspects de la loi « famille » abandonnée, formulent une proposition de loi qui sera bientôt discutée au Parlement, une solution semble devoir s’imposer: offrir davantage de médiation familiale, la rendre plus visible et aussi la rendre obligatoire dans certaines situations -typiquement, une fausse bonne idée.
La médiation familiale, c’est cette forme de médiation qui se propose de soutenir et d’accompagner les couples en rupture. Le médiateur est un professionnel de la famille, un « tiers neutre », qui offre de créer, avec la participation des intéressés, un espace où discuter l’ensemble des aspects de la réorganisation des relations familiales au moment d’une séparation. Lors de quelques séances qui réunissent les deux partenaires et le médiateur il s’agit d’envisager les décisions à prendre en ce qui concerne la vie des enfants, le partage des biens et tout ce qui pourrait faire problème ou envenimer les relations jusqu’à déclencher des conflits ouverts. Le médiateur se propose de sécuriser cette discussion et d’aider à la négociation. En France, la médiation familiale est devenue une profession il y a dix ans. Plusieurs centaines de médiateurs exercent leur activité, de manière assez discrète, le nombre des candidats au divorce qui s’adressent à eux restant encore bien limité, une dizaine de milliers de couples tout au plus chaque année, un très petit pourcentage de l’énorme contentieux du divorce et de la séparation.
On comprend les raisons de l’intérêt pour la médiation: celle-ci constitue, dans la famille comme c’est le cas à l’école ou dans les relations internationales, une belle idée, une solution généreuse qui vise à insuffler des principes de parité, d’équité, un esprit de démocratie qu’on voudrait voir régner partout.
La médiation familiale serait appelée à devenir l’outil « magique » capable de figurer sur toutes les scènes du conflit familial, voire même au-delà. On en veut, bien sûr, à proximité des cabinets des juges aux affaires familiales. On en veut auprès des couples non seulement pendant le temps de la rupture, mais aussi dans l’après-divorce pour suivre les décisions prises, par exemple lorsqu’une résidence en alternance des enfants a été fixée. Mais ce n’est pas tout : on nous dit que le médiateur familial pourrait voir son champ d’action élargi au-delà du conjugal : s’occuper des difficultés relationnelles entre les ados et leurs parents, entre les parents et les grands-parents ; voire prendre en charge certaines mesures d’assistance éducative, les décisions prises par les juges des enfants en cas de danger, ou encore intervenir dans le champ de la santé, sur les relations entre patients et soignants, etc. Bref, on voudrait en faire la personne à tout faire des différends et des dysfonctionnements familiaux.
A ça, il n’y a pas que les « bonnes raisons » évoquées plus haut. Il y a aussi que les médiateurs, qui ont réussi en vingt ans à se constituer en profession, n’ont guère de travail et cherchent à étendre leur « juridiction professionnelle ». Ayant obtenu de l’Etat une reconnaissance que d’autres groupes professionnels n’ont pas eue, ils sont devenus les nouveaux « experts » de la famille, à ceci près que la médiation reste une profession avec peu de clients et qui n’offre que peu d’emploi. Du coup, les médiateurs recherchent aujourd’hui, avec le même volontarisme, à susciter l’adhésion à la médiation, soit auprès de leurs clients « naturels », les couples en rupture, soit dans les nouveaux champs connexes qu’on a cités.
D’autres raisons encore, peut-être, militent en faveur du développement de la médiation familiale. Notamment, mais de cela on ne parle pas, le coût économique supposé moins élevé pour l’Etat du « traitement alternatif » des litiges familiaux – qu’il s’agisse d’épargner les ressources considérables mobilisées sur le plan judiciaire ou d’assurer une meilleure prise en charge des enfants concernés sur le plan pratique et affectif. Ces arguments, s’ils sont présents dans les sphères gouvernementales, ne sont pourtant jamais explicités, les seules justifications avancées tenant au caractère pacificateur de la médiation.
Comment faut-il voir la possibilité d’étendre le champ d’action de la médiation familiale? Qu’attendre du développement de cette pratique? En premier lieu, il y a des questions de faisabilité. Les médiateurs sont peu nombreux, les capacités de formation existent, mais elles sont limitées. On peut vouloir aiguiller davantage de situations vers la médiation familiale, encore faut-il s’assurer que la profession est capable de fournir le service attendu. En Grande-Bretagne, il y a déjà plus de dix ans, le gouvernement n’est-il pas revenu en arrière après avoir fait passer le traitement de l’ensemble des divorces à la médiation familiale, à cause de la désorganisation qui en est résulté? Si l’on veut éviter un tel « pas de clerc », il faudrait revenir sur cette expérience et établir des prévisions et un cahier des charges bien précis quant à la situation française.
On peut aussi s’inquiéter de la pertinence du choix du « tout-médiation ». Vouloir faire du médiateur une personne à tout faire, en élargissant son champ de compétence, c’est oublier qu’il existe d’autres spécialistes de la famille, implantés depuis longtemps, efficaces, qui interviennent pour soutenir et accompagner les personnes dans différentes occurrences. On pense aux conseillers conjugaux et familiaux, toujours à la recherche d’un statut, qui sont plusieurs milliers en France et qui travaillent avec les couples en difficulté. On pense aux enquêteurs sociaux ou encore aux travailleurs sociaux qui exercent les mesures d’action éducative en milieu ouvert. Et aussi aux intervenants des espaces de rencontre qui se donnent pour mission de faciliter la reprise ou le maintien des relations enfants-parents lors des ruptures conflictuelles. Ces professionnels interviennent sur différents « segments » des difficultés conjugales et familiales. A vouloir que les médiateurs remplissent les mêmes fonctions, on risque un brouillage des identités professionnelles et des « incidents de frontières ».
Il faudra veiller aussi, si l’on veut développer la médiation familiale, à faire en sorte qu’elle soit utilisée à bon escient. En particulier, on sait depuis longtemps que la médiation n’est pas appropriée dans les situations de violence avérée et continue. Et ce risque est encore accru lorsque la médiation est assortie d’une obligation, ce qui est proposé maintenant. En France, les médiateurs familiaux ne considèrent pas qu’il soit utile de mettre en place un dépistage de la violence, comme dans d’autres pays, aux Etats-Unis en particulier. Ils préfèrent considérer que le travail effectué avec le médiateur doit permettre de détecter de tels cas et que leurs compétences professionnelles les autorisent à intervenir. Il serait dommage que la pression sur les divorçants se trouve accrue pour qu’ils aillent en médiation sans qu’une réflexion sur cette question soit menée et rendue publique.
Enfin, se pose la question de savoir ce qu’on peut attendre véritablement du développement de la médiation familiale. Décider, comme certains le pensent, que les couples « n’ont qu’à » aller en médiation, est-ce la bonne solution? S’il est clair, en apparence au moins, que nous n’avons pas de meilleur modèle de gestion des crises, comment se fait-il que la médiation n’ait pas rencontré davantage de succès dans son développement? Et peut-on penser que ce modèle soit si pertinent qu’il doive s’imposer à tout le monde?
Quand on y regarde de plus près, la médiation s’apparente à une manière particulière de faire fonctionner le couple et la famille. Dès lors qu’elle valorise exclusivement la négociation comme outil de gestion du conflit et de réorganisation des relations familiales, elle s’adresse à des couples qui ont déjà les capacités pour réaliser ce qui est attendu d’eux. Quels couples peuvent réussir cette opération singulière qui consiste à se séparer tout en restant en lien sur un mode « raisonné »? La réponse est évidente : ceux qui fonctionnaient déjà sur un mode négociateur en tant que couple et peuvent continuer à le faire dans la séparation. Or, tous les couples ne fonctionnent pas de cette manière, loin de là. Peut-on vraiment penser que tous puissent se « convertir » au modèle de la coparentalité voulu par les médiateurs et inclus dans le dispositif qu’ils mettent en place. Les statistiques ne trompent pas à cet égard : le faible nombre de médiation vient de là. Les conjoints anticipent que s’y engager en impose beaucoup : rencontrer « l’autre », l’écouter, négocier et, bien sûr, faire des concessions… En réalité, la médiation prêche surtout des convaincus. Elle s’adresse à des couples qui veulent « bien faire », en pensant notamment à leurs enfants.
Alors, faut-il donner davantage de chance à la médiation en la rendant plus « obligatoire »? Les médiateurs y gagneraient peut-être quelques clients. Mais le prix à payer serait très élevé: un renoncement à la définition même de la médiation et, à terme, une routinisation de la pratique qui deviendrait un passage obligé supplémentaire pour les divorçants, sans aucune garantie qu’ils y abandonnent leur conflit.
Le « décollage » de la médiation, attendu depuis plus de vingt ans, ne se fera pas par décret. Il ira de pair avec la diffusion, dans la société toute entière, de la culture de la négociation. Il pourrait être aussi facilité par une réflexion plus ambitieuse sur les réorganisations familiales qui ne parte pas des intérêts des intervenants en place, mais qui reprenne la question des besoins des divorçants et de leurs enfants pour rediscuter les rôles des professionnels dans la prise en charge de ces affaires. A la faveur d’une telle réflexion, le divorce pourra être en partie déjudiciarisé et les médiateurs y gagneront un nouveau rôle. Obliger les couples à aller en médiation lorsqu’ils se séparent et sont en conflit ne suffira pas faire descendre des grues les pères en colère. Il faut aujourd’hui un programme de réflexion et d’action de grande ampleur pour que chaque parent se sente mieux reconnu et pris en considération, au bénéfice des enfants.
2014, Février : La Loi Famille en réflexion
2013, Février : Le Ministre de la famille s’exprime ici
2012, Novembre : Journal « La Croix »
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2012, Novembre, la Gazette du Palais
Article Gazette du Palais : Et si les juges aux affaires familiales et les avocats se saisissaient réellement de la médiation familiale dans l’intérêt des enfants et des couples qui se séparent ?, Marc Juston
Plus généralement, …La Médiation Familiale et la LOI
Depuis 1995, plusieurs textes de lois ont permis la reconnaissance officielle de la médiation familiale en droit français. Parmi ceux-ci, deux textes de lois donnent une large place à la médiation familiale, la loi sur l’autorité parentale du 4 mars 2002, et la loi sur la réforme du divorce du 26 mai 2004 entrée en vigueur le 1 janvier 2005.
La Loi de 2002 tend à généraliser le caractère conjoint de l’exercice de l’autorité parentale quelque soit la nature du lien de filiation, à responsabiliser les pères et mères dans leurs prérogatives et obligations parentales, à pérenniser les liens entre les parents et les enfants.
Le second texte de loi vise à humaniser les procédures de divorce pour mieux accompagner les parents à créer une organisation responsable des conséquences de leur séparation à l’égard de leurs enfants.
Ces deux textes donnent la possibilité aux juges de suspendre la procédure judiciaire afin de faciliter le recours à la médiation familiale.
En effet :
«A l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut proposer aux parties une mesure de médiation et après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ». « Il peut leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure ».
Liens utiles
Fédération Nationale de la Médiation et des Espaces Familiaux (FENAMEF)
http://www.mediation-familiale.org
Association Pour la Médiation Familiale (APMF)
http://www.apmf.fr
Association Nationale des Médiateurs (ANM)
http://mediateurs.asso.fr
Infos sur La médiation de couple
http://www.mediate.com/articles/maritalmediation1.cfm
Service Public http://www.service-public.fr
Justice : http://www.justice.gouv.fr
Orientation professionnelle et Bilan de compétences http://www.oxy-jeunes.fr
Historique de la Médiation Familiale
Une origine outre-atlantique
Née aux Etats-Unis, la médiation familiale apparaît en France à la fin des années 80 comme une approche novatrice et complémentaire du Droit dans la résolution des conflits familiaux liés au divorce et à la séparation.
Technique d’entretiens pratiqués par un médiateur familial tenu à l’obligation du secret, elle s’adresse aujourd’hui à tous les membres de la famille.
Hier, considérée comme un processus de gestion des conflits, la médiation familiale est depuis devenue une évidence pour restaurer le dialogue au sein de la famille.
Aux Etats-Unis dans les années 70, les premières recherches sont menées par un avocat, J. COWLSON, qui, à partir des techniques d’arbitrage, tente de réduire les effets traumatiques du divorce.
O.J.COOGLER, avocat, thérapeute d’Atlanta ouvre, dans le privé, le premier centre de médiation familiale. Il rend compte de sa pratique en publiant en 1978, un ouvrage intitulé « Structured mediation in divorce settlement : a handbook for marital mediators » à l’instar du travailleur social et professeur en sciences sociales J.M.HAYNES qui propose aux travailleurs sociaux de devenir des médiateurs familiaux dans « Divorce mediation : a pratical guide for therapists and counselors ».
La Justice se saisit également du dispositif. L’ETAT de Californie, le premier, adopte une loi obligeant les parents en conflit sur la garde des enfants à rencontrer un médiateur familial. De nombreux Etats américains suivront. Le recours à la médiation familiale se généralise rapidement sur tout le territoire national jusqu’à passer la frontière et atteindre le Canada.
Mais au Canada, la médiation familiale, à la différence des Etats-Unis ne fait pas l’objet d’une loi. Le législateur ne souhaitant pas lui conférer un caractère obligatoire, préconise son recours et intègre, dans la loi de 1985 sur le divorce cette disposition.
La France s’inspirera directement du modèle canadien qui conserve une démarche volontaire des participants à la médiation familiale.
Le voyage initiatique de quelques français au Canada
C’est d’ailleurs au Québec –la langue française facilitant la communication- qu’est organisé à la fin des années 80, le premier voyage pluridisciplinaire d’un petit groupe de français.
Des avocats, des thérapeutes, des psychologues, des travailleurs sociaux, des conseillers conjugaux, fleurant le bien-fondé de cette méthode, s’y rendent pour découvrir les arcanes de la médiation familiale et s’initier concrètement à sa pratique.
Ils rentrent en France avec dans leurs valises des tas de projets et dans leur tête l’idée solide qu’ils viennent de découvrir une approche novatrice et complémentaire du Droit dans les résolutions de conflit familial lié au divorce et à la séparation, capable d’intégrer le travail social.
Pour faire connaître et pour développer la médiation familiale, ces professionnels se regroupent et créent l’Association pour la Promotion de la Médiation Familiale (A.P.M.F) dont la première tâche sera la rédaction d’un code de déontologie.
Premier congrès européen à Caen sur la médiation familiale
En octobre 1988, un service de médiation familiale est ouvert à Caen par l’Association des Amis de Jean Bosco, qui organise dans la foulée, en collaboration avec l’APMF, le premier congrès européen de médiation familiale en France, en 1990, réunissant plus de 500 participants de huit nationalités différentes.
C’est l’occasion de présenter la médiation familiale à des professionnels de tous horizons.
A cette époque, le nombre de divorces augmentait considérablement ; la médiation familiale pouvait paraître la bienvenue pour alléger le contentieux judiciaire.
Or, les premiers médiateurs familiaux n’ont jamais présenté la médiation familiale comme un substitut aux démarches judiciaires et ont toujours précisé qu’elle pouvait venir en marge.
Le milieu judiciaire qui craignait quelque peu la concurrence, est resté assez méfiant face à cette nouvelle pratique.
En 1997, elle se définit comme un processus non plus de résolution mais de gestion de conflit.En 1998, à la conférence de la famille qui présente les grandes orientations de la politique gouvernementale de la famille, Lionel JOSPIN, Premier Ministre et Martine AUBRY, Ministre de l’emploi et de la Solidarité annoncent le développement des Réseaux d’Ecoute d’Appui et d’Accompagnement des Parents.
L’éclosion de la politique autour de la parentalité mise en place par la Délégation interministérielle à la Famille ouvre la voie à la médiation familiale.En 2001, Madame Ségolène ROYAL, Ministre de la Famille, institue le Conseil National Consultatif de la Médiation Familiale (arrêté du 8 octobre 2001) dont la présidence est confiée à Madame Monique SASSIER, Directrice Générale de l’UNAF (Union Nationale des Associations Familiales), avec pour tâche de mettre en place « un métier pour l’avenir ».
Nommé pour 3 ans, le Conseil est chargé de faire des propositions concrètes et opérationnelles visant à «favoriser l’organisation de la médiation familiale et promouvoir son développement».
Le conseil prendra position pour la professionnalisation de la médiation familiale, ce qui va déboucher le 3 décembre 2003 sur la parution d’un décret (n°2003-1166) qui porte création au Diplôme d’Etat de Médiateur Familial. L’arrêté du 12 février 2004 complète sa mis en œuvre et la circulaire du 30 juillet 2004 (n°DGAS/4A/2004/376) précise les modalités de la formation, à l’organisation des épreuves de certification et à la validation des acquis de l’expérience (VAE). La circulaire prévoit également les procédures d’agrément et le contrôle des établissements de formation.